Vous êtes ici

Recherche dans les textes de "À lire pour vivre"

2022-C-Lc 5, 27-32 -samedi des cendres- extension et communication.

Année C : samedi des cendres (litc00s.22)

Lc 5, 27-32 ; Is 58, 9b-14   extension et communication.

J’ouvre ce temps du carême par ces mots d’un docteur de l’Église, Grégoire de Nazianze : ne restons pas ce que nous sommes, devenons qui nous étions. En invitant Lévi à le suivre, Jésus donne, redonne à un « bon à rien », à un engolfé, pour citer Jean de la Croix (Montée du Carmel, livre 3, chap.19), un magouilleur dont l’appétit de l’avoir, protégé par des paradis fiscaux, n’a pas de limite (Cf. EG # 56), d’être extension et continuation (Jean Eudes) de ce qu’il est.

Nous ne sommes pas spectateurs ou lecteurs de ce passage de Luc. Nous en sommes des réalisateurs. En l’écoutant, éprouvons-nous quelque chose comme le sentiment de la réalité ? Éprouvons-nous la joie de saisir que sa présence à nos tables atteste que nous ne sommes pas corrompus à jamais (pape François) ? Elle nous convie plutôt à devenir des extensions de sa manière de vivre.

C’est rassurant de savoir que Jésus n’a pas recherché une table parfaite où s’asseoir. Il n’en aurait pas trouvé. En s’assoyant à nos tables, Jésus veut que les enfants du siècle plus habiles pour les choses de ce monde que les enfants de lumière (Cf. Lc 16, 8) deviennent ce qu’il est. Il les veut ses ambassadeurs, sa présence incarnée jusqu’à pouvoir dire qui me voit, voit Jésus. Tel est l’appel que contient le mot carême. Se convertir à faire voir Dieu dans nos vies. Mission impossible, mais nécessaire.

Être Jésus tel qu’il est ne sera jamais déracinable en nous, même si c’est impossible à atteindre. En prenant place à nos tables, Jésus sert de lanterne. Un poète, René Char, affirme merveilleusement cela. L’impossible, nous ne l’atteignons pas, mais il nous sert de lanterne. Ce temps du carême, par sa liturgie qui jette des mots devant nous pour qu’ils nous tirent en avant (Jean Sullivan), nous sert de lanterne.

C’est dans la mesure exacte de notre union à Jésus que chaque personne verra en nous ce Jésus lui-même. Chacun de nous est signe et porteur de cet itinérant par excellence qui est le Christ. Chacun de nous est amené à être, moyennant la démission de soi que cela suppose, l’extension et la continuation de Jésus. Être l’avenir de Jésus, c’est le projet de notre montée pascale. Les racines de Dieu en nous sont tellement profondes que rien, qu’aucun comportement d’engolfé ne réussira pas à arracher de nous se devenir.

Cet appel de Lévi fait resurgir en nous que Jésus bâtit son avenir sur nos failles, sur nos sécheresses et sur celles de son Église (Cf. Mt 16,18) qui se méritera toujours le reproche, écrit John Newman, d’être la mère de fils indignes. Il y en a qui sont bons, d’autres moins bons, voire mauvais. Le Père Carlo Carretto[1] dont on a dit qu’il était le Jean-Baptiste des temps modernes, n’a aucune gêne d’affirmer : Église combien tu es contestable, et pourtant combien je t’aime ! Combien tu m’as fait souffrir, et pourtant combien je te suis redevable.  

Le temps qui s’ouvre n’est pas pour devenir parfait. C’est impossible. Il nous questionne sur comment se porte notre devenir Jésus, notre être extension de Jésus, tout en sachant que nous ne sommes pas des anges [et que] ce qui nous est naturel, c’est de nous relâcher (Thérèse d’Avila) ; qu’il faut avancer sans cesse et défaillir sans cesse (Ruysbroeck). L’appel de Jésus nous élève au-delà de nous-mêmes pour nous enfoncer en lui.

C’est en souffrant nos imperfections que nous apprenons à devenir Jésus. Cela passe et passera toujours par l’accueil de nos pauvretés, de nos indigences, par notre réconciliation avec nos failles surtout lorsqu’elles sont très opaques et par le courage créatif d’être ses ambassadeurs. Nos failles exigent que Jésus ne s’éloigne pas de nous. Cela s’appelle se convertir. Isaïe dit cela dans la lecture : on t’appellera celui qui répare les brèches, celui qui remet en service les chemins.

À votre contemplation. L’appel des Lévi que nous sommes, si nous le comprenons bien, ouvre à la fois sur un enfer et un paradis. L’enfer est de prendre conscience que rien n’est pire que de se croire meilleur, que de constamment chercher ses propres intérêts. Et le paradis, François d’Assise l’exprime dans son testament et cela donne de la hauteur au mot carême, le Seigneur me donna la grâce de commencer à faire pénitence. AMEN.

 

[1] Carlo Corretto : J’ai cherché et j’ai trouvé, Cerf, Paris 1983, p 159

 

Évangile: 
Année: 
Pérode: 
Date: 
Dimanche, 20 février, 2022

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
Image CAPTCHA
Saisir les caractères affichés dans l'image.