Année C : Lundi de la 1er semaine CARÊME (litcc01l.10)
Mt 16, 13-19 Qui suis-je ? qui sommes-nous?
S’il est une question aujourd’hui qui fait la une des journaux d’ici et d’ailleurs, c’est bien celle de notre identité. Elle suscite beaucoup préoccupation autour de nous. Mais chez Jésus, et le passage de Matthieu que nous venons d’entendre le montre, sa question-demande ne dégage aucunement qu’il est tourmenté par son identité. Nous connaissons bien la réponse de Pierre mais est-ce que nous réalisons que dans sa réponse à Pierre, Jésus donne de l’avenir à notre identité. Sur Pierre, sur nous, Jésus bâtit son Église. Voilà notre identité.
Cette question de Jésus à Pierre qui ouvre sur notre identité, demeure une question nouvelle. Nouvelle pour de nombreuses personnes qui n’en connaissent même pas l’existence parce qu’elle n’est pas parvenue jusqu’à eux, parce qu’elle n’a pas retenti dans leur environnement. Alors comment ces personnes peuvent-elles entendre la réponse de Jésus qu’il s’appuie sur eux pour bâtir son Église ?
Nouvelle pour d’autres qui ont entendu cette question dans leur enfance, qui connaissent quelque chose de Jésus, mais pour qui la réponse que Jésus donne à Pierre ne leur convient plus. Pour eux, ce n’est pas croyable de se voir mandatés d’une telle mission. Nouvelle pour d’autres encore qui après avoir côtoyé Jésus à distance durant des années, après avoir lu certains passages de l’Évangile, n’ont pas encore saisi que dans sa réponse à Pierre, Jésus leur donne une dignité et un avenir de grâce : je bâtirai sur vous mon Église. Y-a-t-il plus beau que cela!
Et pour nous ici, il y a la réponse de Pierre qu’avec empressement et beaucoup de profondeur nous faisons nôtre avec nouveauté. Tu es le Fils de Dieu. Il y a aussi à entendre, à recevoir non pas avec notre intellect mais viscéralement dans la profondeur de nos cœurs, la réponde de Jésus : Sur nous, je bâtirai mon Église.
Saintetés, pour que Jésus puisse bâtir sur nous son Évangile, il faut d’abord reconnaître en Jésus le Fils de Dieu. Tu es le Fils de Dieu. Si exacte soit-elle dans son contenu, la réponse de Pierre n’épuisera jamais toutes nos réponses possibles. Il revient à cette chaire de Pierre d’en reformuler pour notre temps une réponse non figée dans un langage séculaire ni issue d’une connaissance théorique, mais qui fait rêver d’un ciel nouveau et d’une terre nouvelle. Je vous suggérais mercredi dernier une réponse «rafraichie» non dans des mots théologiques mais plutôt imagés : Tu es notre saint Valentin, celui qui prend les devants (Péguy), s’empresse de nous épouser, de nous trouver de son goût. Tu es Celui qui vient nous sauver de nos malheurs pour transformer nos vies en la Tienne.
Mais cette déclaration que nous voulons personnelle : tu es le fils de Dieu nous ne le réalisons pas assez, ouvre notre identité sur un avenir assuré : Rien ne prévaudra contre elle. Mais pour que puisse éclore en nous cette identité nouvelle, pour que puisse s’établir en nous cet espace où nos vies deviennent cette bonne terre où s’érige son Église, il faut que nos affections aux créatures aient été chassées de nous (Montée du Carmel). Il faut et je paraphrase le message du Carême de Benoit XV1, que je me libère de mon «moi» et (que je) me donne gratuitement en échange son «soi». Pour bâtir son Église, il faut éviter la tentation- nous l’avons entendu hier dans l’évangile, de nous croire le centre du monde, celle de rechercher pour nous-mêmes la toute-puissance ou encore celle du prestige et de la gloire. C’est en nous décentrant de nous-mêmes, en perdant de vue nos chers «moi» pour devenir Lui que nous bâtirons son Église.
Le meilleur moyen de savoir qui est Jésus est de nous oublier pour devenir les intimes, les épousés de Dieu. Et lorsque nous serons complètement perdus en lui, nous deviendrons et c’est ce que Jésus confirme dans sa réponse à Pierre, cette bonne terre dans laquelle il enfouit la semence pour bâtir à trente, soixante et cent pour cent son Église.
N’ayons pas peur d’entendre cette question de Jésus. Recevons la réponse de Jésus à Pierre et je paraphrase le psaume 36,6, comme un délice. N’ayons pas peur de la semer, là où nous sommes, tels que nous sommes. Nous avons mission de la sortir de la profondeur de nos hivers pour qu’elle ouvre sur un printemps tant attendu. Nous avons mission de la semer en abondance à tout vent, inlassablement et avec prodigalité. AMEN
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