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2017- Jn 14, 1-12- Célébration de la parole : la beauté de la mort en chrétien

CÉLÉBRATION D'A-DIEU AU SALONFUNÉRAIRE

 Jean 14, 1-12

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La mort, c'est la Vie qui se recueille... recueillons-nous (Magdaleth).

Nous sommes ici pour un instant d'admiration. Celui de savoir dans les mots du philosophe Spinoza, non chrétien (XVIIe siècle), que nous savons et nous sentons que nous sommes éternels. Ne dites pas mourir. Dites naître, écrivait Victor Hugo.

Un instant d'admiration. Humains, nous sommes conscients qu'il y a quelque chose de plus grand que la mort. Il y a en nous une source de vie que rien ne peut éteindre, une vie d'une autre nature que mortelle. Notre existence n'est pas un fatal compte à rebours, mais cache en elle les prémices d'une vie autre, sans fin. Telle est la merveille qui nous rassemble.  Tout n'est que naissance. Pour chacun d'entre nous, naître c'est naître en vue de renaître, en vue de ressusciter. Nous allons vers notre origine. Nous naissons pour naître à jamais. Tout n'est que genèse. Tout n'est que commencement.

Avouons-le. Devant la mort, nous avons des yeux obstrués par des cataractes. Nous ne voyons qu'une urne avec un peu de cendre. Il nous faut voir avec le cœur. On ne voit bien qu'avec le cœur, disait le Petit Prince qui ajoutait: l'essentiel est invisible aux yeux. Le renard ajoute: les hommes ont oublié cette vérité. Toi, tu ne dois pas l'oublier. C'est le regard que nous posons sur la mort qui nous sauve de toute déprime.

La foi chrétienne nous apprend que quelque chose est arrivé à Jésus. Ce quelque chose, a  fait dire au prieur Christophe de Tibhirine, assassiné en Algérie et dont le film Des hommes et des dieux a ravi la planète: je suis ressuscité, je peux donc mourir. Jésus a goûté la mort (He 2, 9) pour que nous puissions goûter la vie, voilà ce qui est arrivé à Jésus; il a tué la mort qui tuait nos vies. Quelqu'un écrivait au Ve siècle, et c'est très beau, trop beau peut-être pour nos oreilles étourdies par la culture de l'éphémère, du jeter après usage, que notre corps mortel a été divinisé, que la poussière a été rénovée (Gn 2,7), la cendre a été divinisée.

Ce qui nous rassemble, c'est une espèce de vie nouvelle.  Je vous offre mes yeux de croyant. Je vous offre de projeter sur ce départ des yeux de Pâques, des yeux qui voient que nos jours s'en vont; mais Dieu offre de les prolonger en les faisant entrer dans [son jour éternel] (Augustin Guillerand). 

Devant la mort, certains d'entre nous peut-être, voient un chemin sans issue qui se referme définitivement et qui ne conduit nulle part. Ce n'est pas le regard du croyant pour qui la mort est une porte, un chemin qui s'ouvre sur un jour nouveau, une terre nouvelle. Un jour, dit l'Apocalypse,  où je ferai toutes choses nouvelles […], il n'y aura plus de mort; il n'y aura plus de deuil, ni de souffrance; les choses anciennes auront disparu.

Je ne vous impose pas cette vision. Je la dépose dans la corbeille de vos cœurs où se trouvent mélangées questions, tristesses, espérances.

Retenons ces mots de cette femme de chez nous, Christiane Singer, qui, atteinte d'une maladie incurable, écrivait  dans Derniers fragments d’un long voyage, Éd. Albin Michel, 2007, p. 28.) : Ceux qui voient dans la maladie un échec, dans la mort une fin n'ont pas encore commencé à vivre.  Ceux qui prônent le droit à mourir en dignité n'ont pas encore commencé à vivre.

Devenons recueillement. Entrons dans le grand mystère de la vie qui n'est pas détruite, mais transformée (préface).

ORAISON

Seigneur, sois attentif à notre prière pour notre sœur Jacqueline qui retourne chez elle, près de Toi.

Accueille-là à ta Table, comme elle a su si bien nous accueillir à sa propre table durant sa longue vie.

Un jour,  tu nous as donné cette femme, Jacqueline. Maintenant, tu la reprends pour qu'elle chante ta gloire. Que ton nom soit béni !

Malgré notre tristesse, ouvre nos cœurs et fais-nous entendre ta Parole d'espérance, toi qui es vivant avec le Père et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles. AMEN.

 HOMÉLIE  À PARTIR DE JEAN 14, 1-12:

Il est urgent aujourd'hui de refonder sa vie sur la beauté. De nous remettre en état de contemplation de la beauté. Nous sommes envahis par des scènes de désolation de toute sorte qui finissent par ronger notre regard. L'urgence est de refonder notre vie sur la beauté.

Cela peut étonner, mais ce que l'évangile apporte à notre monde, c'est un regard de beauté. Il nous faut retrouver ce regard. On a écrit: la beauté sauvera le monde (Madeleine Delbrel). Cette page tirée de l'évangéliste Jean, ouvre sur la beauté d'un chemin. Ce qui fait le charme de ce chemin, c'est qu'il comporte plusieurs avenues, plusieurs artères, celle de l'entraide, de la compassion, de la charité, de la justice, de la joie. Nous ne finirons jamais de découvrir et d'être fascinés par la beauté de ces avenues qui ouvrent  la beauté des beautés qu'est Dieu.

Dieu, pour autant que nous puissions donner un visage à ce nom, ne s'est pas contenté d'une théorie sur la beauté, il l'a montré en se faisant l'un de nous. Une laïque du XIXe siècle, Catherine de Sienne, disait dans l'une de ses lettres que Dieu nous trouvait tellement beaux qu'il a voulu devenir ce que nous sommes. Dans sa personne, Jésus nous montre un chemin pour vivre en état de beauté, en état d'harmonie avec notre identité profonde. Il est venu attester que nous, humains, sommes la beauté de la beauté de Dieu.  Question : voyons-nous en nous cette beauté ? La beauté de ce chemin qui y conduit ? 

Trop longtemps, l'évangile n'a été perçu qu'à travers des lois, presque des mises en demeure. Ce dont nous avons besoin dans notre société laïque, et c'est heureux qu'il en soit ainsi, c'est de rencontrer des personnes capables de faire voir la beauté de Jésus. Capables de rayonner de cette beauté.

Durant sa vie, Jacqueline n'a pas dénaturé et  perverti ce regard de beauté et d'émerveillement. La beauté, à l'exception de sa peur mortelle des chiens, est ce mot clé qui ramasse toute sa vie. Nous voyons ce que nous sommes, dit-on. Et Jacqueline savait voir ce qui était beau. Elle savait voir ce qu'il y a de beau dans l'évangile. Le projet Jésus d'aider, de compatir, d'être présent aux autres répondait à ce qu'elle était dans son être profond. Non seulement elle voyait ce qu'elle était, mais elle était dans son être profond, ce qu'elle voyait. 

Une vie vécue en état de beauté nous rassemble aujourd'hui. Je songe, ici, à la beauté de son oui à Philippe et vice versa, un oui dont je fus témoin comme servant de messe à leur mariage, il y a 66 ans. Ce oui fut prononcé entre un citadin et un villageois. Quoi de plus risqué! Il a fallu bâtir des ponts de convergence, dirions-nous aujourd'hui, qui ont résisté aux inévitables bourrasques.

Je songe à la beauté qu'elle anticipait en voyant une simple pièce de tissu. Je l'entends dire: ça fera un beau chandail, une belle jupe. Entre ses doigts de fée, un simple tissu devenait presque qu'une œuvre d'art.  Elle savait faire surgir, je dirais presque sculpter, quelque chose de beau dans un simple tissu. On peut appliquer à Jacqueline ce que disait le sculpteur Alberto Giacometti : la grande aventure, c’est de voir surgir quelque chose d’inconnu, chaque jour, dans le même visage. C’est plus grand que tous les voyages autour du monde.

Elle voyait ce qui était beau, mais aussi rendait beau ce qui l'était moins. Elle a remarqué un jour que mon aube n'était pas, si je peux m'exprimer ainsi, au niveau. Elle m'a fait monter sur la table de cuisine et outillée d'une règle et d’épingles, elle m'a fait tourner en rond pour niveler le tout. Ce petit geste de me rendre «beau» disait tout ce qu'elle était.

Là où Jacqueline passait, elle laissait des traces de beauté. Quand je visitais ma mère, je détectais facilement si Jacqueline était passée par là. Tantôt, un bibelot, tantôt un bouquet de fleurs séchées, tantôt un cadre reproduisant les quatre saisons, se retrouvait dans sa chambre. Et maman me disait que la présentation était aussi belle que le cadeau. Quoi de plus beau qu’une vie de beauté totale, partagée dans la beauté de l’amitié, du service, de la présence aux autres qui l'habitait. Je dirais même qui l'habillait. 

Et nous voici ensemble pour rendre grâce pour la beauté de cette vie. Beauté qui fut vécue en fin de vie en état de beauté chez elle, grâce au soutien de Philippe, de Marie, Michel et André et du personnel du CLSC, qui ont apporté une présence rassurante et quotidienne.  Et je me  permets d'ajouter au nom de Jacqueline, son merci à Philippe, à ses enfants et aux personnels du CLSC pour l'avoir accompagné jusque dans son silence pénible des derniers mois. 

 Je conclus par ces mots d'un poète : quiconque demeure capable de voir la beauté ne devient jamais vieux (Gustav Janouch, Conversations avec Kafka)  et par ceux d'un Père de l'Église : nous sommes aux yeux de Dieu, des grains de poussière de toute beauté.  Pour cette manière si fascinante de vivre, mon âme exalte le Seigneur. Magnificat. Amen.

CHANT: AVE MARIA

Intentions de prière

Seigneur Jésus, toi, le premier des ressuscités d'entre les morts, accueille Jacqueline chez elle chez toi; ajoute un couvert à ta table, car elle était notre amie, nous t'en prions.

Seigneur, renouvelle en nous, qui sommes frappés par ce départ,  ta présence et fais croître en nous cette certitude de foi que ta miséricorde est plus forte que nos éloignements de toi, nous t'en prions.

 Seigneur Jésus, toi qui viens de Dieu, révèle-toi à ceux et celles qui cherchent le sens de leur voyage sur terre, nous t’en prions.

Seigneur Jésus, premier passeur de la mort à la vie, donne-nous de comprendre ton invitation et ton appel à partager cette nouvelle espèce de vie qui nous est réservée, nous t’en prions.

Prière finale: Un grand amour m’attend...

Un grand amour m’attend...
Ce qui se passera de l’autre côté
 Quand tout pour moi
 aura basculé dans l’éternité...
 Je ne le sais pas !
 Je crois, je crois seulement
 qu’un grand amour m’attend.
 Je sais pourtant qu’alors, pauvre et dépouillé,
 je laisserai Dieu peser le poids de ma vie,
 mais ne pensez pas que je désespère...
 Non, je crois, je crois tellement
 qu’un grand amour m’attend.
 Si je meurs, ne pleurez pas,
c’est un amour qui me prend paisiblement.
Si j’ai peur... et pourquoi pas ?
Rappelez-moi souvent, simplement,
qu’un grand amour m’attend.
Mon Rédempteur va m’ouvrir la porte,
de la joie, de sa lumière.
Oui, Père, voici que je viens vers toi.
Comme un enfant, je viens me jeter dans ton amour,
ton amour qui m’attend.

Bénédiction des cendres

Jacqueline,          Philippe, ton époux te dit,

                              Tes enfants Marie, Michel, André te disent,

                              Tes parents, tes amis te disent,

                              et moi au nom de l'Église, au nom de Dieu, je te dis:

 

                              Pars en paix et va t'asseoir à la table de l'eucharistie sans fin.  

 

Chant: Le seigneur est mon berger.

 

 

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Date: 
Jeudi, 1 juin, 2017

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