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2020-A- Lc 9, 43-45 -samedi 25e semaine ordinaire-travailler l'oreille

Année A : samedi de la 25e semaine ordinaire (litao25s.20)      

Lc 9, 43-45 ; Qo 11, 9 – 12, 8 : travailler l’oreille.   

J’aime beaucoup l’expression «travailler l’oreille». Les musiciens l’utilisent souvent pour identifier avec exactitude une note parmi une kyrielle de notes. Ils ont une oreille fine, dit-on. Pas seulement eux. Certaines personnes à l’écoute d’un bruit de moteur peuvent en préciser le problème. Pensons à l’oreille du chien deux fois plus efficace que la nôtre et qui perçoit jusqu’aux ultrasons. Les chauves-souris voient avec leurs oreilles. Elles émettent un signal sous forme d’ultrasons et écoutent leurs échos pour se déplacer. Elles distinguent leur environnement avec leurs oreilles. Les éléphants communiquent avec leurs oreilles. D’où leur immensité. D’autres par contre, travaillant dans des chaines de montage dans un environnement où les décibels sont élevés ou aigus en permanence,  perdent de leur capacité d’entendre.  

 Travailler l’oreille. Il faut plus que marcher avec quelqu’un pour cela. Il faut le laisser réchauffer nos cœurs. Il a fallu une longue marche aux disciples pour entendre la voix de celui qui les a rejoints sur la route. Ils n’étaient pas très attentifs parce que leur cœur était étouffé, fermé par la tristesse et la déception. La parole pourtant claire de Jésus ne les atteignait pas  (cf. Lc 24, 35-48).  Il a fallu beaucoup de patience à Jésus pour «travailler l’oreille» de ses disciples qui l’accompagnaient sur la route. Il n’a pas réussi parce qu'ils ne voulaient rien entendre du langage de la croix. Ça ne t’arrivera pas, dit Pierre. Cette parole était voilée pour eux (cf. Lc 9, 45).  

 Travailler l’oreille. Ici, dans cette chapelle, tous les jours des visages reviennent s’asseoir en silence. Ils viennent travailler l’oreille dans un environnement de silence. Souvent, leur situation n’est pas facile. Leur croix est lourde. Vous les voyez, les admirez, vous ne savez pas ce qu’ils entendent. Vos oreilles ne sont pas assez raffinées, ouvertes, aiguisées pour entendre l’ultrason de leur prière, la profondeur de leur conversation avec Dieu.  Vous voyez seulement les effets. Ces personnes sont bonnes, souriantes, accueillantes, respirent le bien-être de vivre même si leur situation n’est pas toujours facile.

Travailler l’oreille pour ne pas devenir sourd d’oreille ou entendre ce que l’on veut, c’est votre unique vocation. Il vous arrive, il m’arrive aussi de ne vouloir rien entendre surtout quand cela remet en question ce que nous pensons et voulons. Travailler l’oreille non par convenance et oublier par la suite comme les neuf lépreux guéris de revenir au Seigneur. C’est beaucoup plus que d’écouter avec ses oreilles du corps, beaucoup plus que d’écouter avec les oreilles du cœur. Beaucoup plus que d’ouvrir nos cœurs à la parole de Dieu. C’est expérimenter Dieu. Nos vies se déifient vu que nous avons une oreille fine capable d’entendre la voix raffinée du Pasteur; il veut que nous habitions de verts pâturages plutôt que de nous enfermer dans des enclos étouffants et sans vie.    

Personne ne peut voir la beauté sans avoir de beaux yeux. Personne ne voit la beauté sans devenir beau (Plotinus). Personne ne peut tendre l’oreille, avoir l’oreille fine sans devenir divin. Cela s’appelle la transfiguration de nos vies.  Gregory Palamas, père du désert, écrit que si nous voulons nous pouvons déifier nos vies. En travaillant l’oreille, nous devenons divins, toute flamme.  Nos vies deviennent la sienne. Nous rendons visible le divin, dit-il[1].  C’est dans le creux de l’oreille (Mt 10, 27) que se vit toute rencontre avec Jésus. Cela exige une dépossession de tout ce qui peut fragiliser mon écoute, voire l’anéantir, car dans le creux de l’oreille règnent aussi des doutes, des peurs. Demandons-nous qu’est-ce qui paralyse notre écoute, qui nous empêche de travailler notre oreille ?

Travailler l’oreille procure une joie bien au-dessus d’une multitude de plaisirs sans goût ni lendemain parce que nous devenons des icônes vivantes de Dieu. Claire d’Assise  a compris cela quand elle écrit à Agnès : regarde-le, médite-le, contemple-le. Trois mots fondateurs pour «travailler l’oreille». L’écoute est le chemin pour ne pas honorer des lèvres et non avec le cœur (cf. Mt 15, 8). 

Travailler  l’oreille, se laisser déranger à chaque instant, se distancer de notre volonté,  déconfiner notre souci de s’écouter, c’est notre programme de vie. Donne-moi, Seigneur, un coeur qui écoute (1R 3:5-9). Sagesse suprême. AMEN.

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[1]  Tanase, Nichifor, Shinning face, Subbto 62, no. 1, 2017, pp.187‐216.

 

 

Évangile: 
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Date: 
Samedi, 19 septembre, 2020

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