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2016-C-Mt 5, 43-48 - et l'ennemi à abattre, si c'était moi ?

Année C- mardi de la 11e semaine ordinaire (litco11m.16)
Mt 5, 43-48 ; et si l'ennemi à abattre était notre ego facilement blessé ?

Je commence par cette prière-témoignage exprimée spontanément près de la tombe d'un leader paysan, Jesùs Chonta; il fut assassiné parce qu’il était une voix, pour les sans voix: Frère Jesùs, je vais prier le Notre Père dans la synthèse que tu en as toi-même donné. Que tes amis sachent que c'est ta volonté que nous ne tirions pas vengeance de ta mort ; que c'est ta volonté que nous ne méprisions pas tes ennemis, mais que nous les plaignons et que c'est ta volonté que seule leur propre conscience les torture (cité par Gui Lauraine, on n'enterre pas la lumière, Éd. Temps Présent, 2015, p. 79).

Cette prière reprend autrement cette demande de Jésus sur la montagne des béatitudes: moi je vous dis : aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous persécutent. Sur la Croix, Jésus s'appliquera à lui-même cette demande qu'il nous fait : Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font (Lc 23, 34). Autant pour ce leader paysan que pour Jésus, cet appel invite à porter sur autrui un regard de bonté originel. Nous ne sommes pas fondamentalement mauvais. Ce n'est pas dans nos gènes. 

Par son appel, Jésus abolit toutes les raisons qui peuvent nous conduire à nous installer dans la haine. C'est un leurre de penser que l'on puisse changer le regard de notre ennemi sur nous. Jésus, et c'est paradoxal, nous propose de changer notre propre regard. Cela ne va pas dans le sens de nos représentations spontanées. C'est en enlevant la poutre de nos regards sur ceux qui nous méprisent, calomnient, haïssent plutôt qu'en intensifiant la paille qui nous hérisse (Cf. Mt 7, 3),  en ne gardant pas de rancune, en dominant notre colère, en pardonnant comme l'a fait ce leader paysan, qu'on en fait nos amis. 

L'évangile fait retentir en nous cette vérité de La Palice : le premier ennemi n'est pas celui que l'on pense. À une autre époque, le code de la chevalerie précisait : tu ne reculeras pas devant l'ennemi, mais qui donc est mon ennemi ?  Et le code précisait: c'est toi-même. Notre force n'est pas dans nos mains. Un psaume nous dit que le  salut d’un roi n’est pas dans son armée, ni la victoire d’un guerrier dans sa force [...]; une armée ne donne pas le salut (Ps 32, 16-17).

Notre force repose dans notre mental. Avoir un mental capable de vaincre les pulsions de vengeance qui som-nolent et risquent de s'éveiller à tout moment. La tentation est grande de faire payer à l'autre ce qu'il nous a fait. C'est notre côté obscur. Pourtant nos gênes à l'image de Dieu ne nous poussent pas à agir ainsi. Se donner un mental fort capable d'oser voir le beau dans l'humain plutôt que son côté pervers dépasse la simple application qu'on peut se procurer sur notre cellulaire. Un mental fort nous responsabilise plutôt que de toujours nous percevoir comme victime.

Subtilement, l'appel de Jésus est une mise en demeure: il faut contrôler nos pulsions qui déshonorent la beauté de l'humain. Nous sommes fragiles et prompts à réagir quand nous sommes attaqués. Blessées, nos mémoires remontent loin dans le passé et font resurgir de vieilles blessures. Nos mémoires blessées sont nos premiers ennemis. Qu'il n'y ait aucun frère... qui ne s'en aille jamais sans ta miséricorde, écrit François d'Assise. L'essentiel n'est pas de ressusciter nos blessures, mais de relever ceux qui nous ont blessés. Jésus invite à briser le cycle de la violence. Pas question de tout accepter, même les brutalités. Jésus demande de ne pas répondre à la violence par la violence.

En écoutant l'appel de Jésus, une question d'un enfant me revient à la mémoire. Maman, est-ce qu'un super méchant peut devenir gentil ? Dit autrement: quand, blessé au plus profond de moi-même, suis-je capable de devenir gentil, d'agir ou réagir sans violence ? Pour refuser de nous voir régler nos conflits à partir de nos mé-moires blessés, mais à partir de l'amour qui est la plénitude de la loi (Rm 13, 8). Cela n'est pas facile. Rester sur le chemin du mal est une source d’illusion et de tristesse, rappelait le pape François dans sa bulle sur le visage de la miséricorde. Il poursuit que la vraie vie est bien autre chose. Dieu ne se lasse pas de [nous] tendre la main. AMEN.

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Date: 
Mercredi, 1 juin, 2016

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