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2006 -B- Jn 14,1-6- Funérailles dame de 86 ans-

HOMÉLIE

À l’heure où la mort est devenu un « fait divers », un phénomène banal presqu’un « divertissement » quotidien que nous rapporte les « nouvelles », nous sommes ici pour célébrer «  l’heure du grand sens de la vie ».  À l’heure où plusieurs autour de nous et peut-être en sommes-nous, vivent leur vie comme un voyage « no-where », Jacline a vécu la sienne en sachant où elle irait demeurer. Elle a donné à sa vie une direction pascale. Elle savait que « la mort ne rompt pas la beauté de la vie. Elle l’a perfectionne ». (Tolstoï)

Nous sommes ici pour entendre des paroles sur la mort que sont signe et font signe, qui sont sens et qui font sens. Nous sommes ici pour entendre non des « idées » sur la mort mais pour saisir que nous sommes en présence du mystère de la vie que clame toutes les spiritualités du monde. 

Quand Jésus s’est présenté chez le chef du centurion romain dont la fille venait de mourir, qu’il a vu l’agitation des uns et les pleurs des autres, il leur a dit : « l’enfant n’est pas morte, elle dort ». « On se moquait de lui » rapporte Marc. (Mc5,40).  Quand Paul s’est présenté aux Romains pour leur parler de la Résurrection, il s’est fait dire : «tu nous en parleras plus tard». Ce matin, au risque que vous receviez mes paroles comme de la fumisterie, je vous redis ces mêmes paroles de Jésus : « Notre sœur s’est seulement endormie dans le Seigneur ». Pour recevoir ces mots dans toute leur profondeur, il faut avoir cette sagesse d’investir par « le dedans » et non par le « dehors », de consacrer du temps à Le prier, Le regarder, Le contempler longuement. «Notre sœur s’est seulement endormie dans le Seigneur ». Ce sont des mots « du dedans », à recevoir par le « dedans », les oreilles du coeur. 

Le poète Augustin Guillerand écrivait : « nos jours s’en vont mais Dieu offre de les prolonger en les faisant entrer dans Son jour ». Parce qu’elle a mise sa foi dans le Seigneur, notre sœur vient d’entrer dans Son jour sans déclin, le jour de Dieu, jour sans souffrance ou règne une paix harmonieuse et durable qui ni la rouille, ni les vers ne peuvent détruire.  Pour citer la petite Thérèse de Lisieux qui prenait beaucoup de place dans sa prière, elle nous dit «je ne quitte pas, j’arrive chez Dieu ».

Comme je souhaiterais ce matin, que nous ayons des yeux de Pâques pour voir que cette tombe cache selon la très belle expression d’un Père de l’Église, une « espèce de vie nouvelle ». Je nous invite à projeter sur cette vie qui s’achève –dans les très beaux mots de Simone Weil – " un regard qui sauve"  parce que " ce qui se voit est provisoire mais ce qui ne se voit pas est éternel"  (2 Cor4, 18) « L'essentiel est invisible » écrivait le petit prince. Et le renard ajoute : « les hommes ont oublié cette vérité. Mais toi, tu ne dois pas l'oublier ». 
 
Ne pas oublier que cette vie qui s’achève, fut une « lettre écrite de la main de Dieu » (2 Cor), écrite avec la fragilité de l’argile pour mieux faire paraître et apparaître la gloire de Dieu. Ne pas oublier que sa vie, même lorsqu’aux prises avec les inévitables perturbations de toute vie conjugale, familiale, sociale, fut de ne jamais désespérer, ni se décourager. Jacline a connu la « grâce du travail » à Poste Canada. Elle a connu la grâce du service. Service de sa famille. « Après avoir tout placé sa famille » s’être assuré que les siens, que chacun de ses proches ne manquent de rien – elle y a pourvue dans sa dernière lettre testamentaire -, dans la joie, elle s’en va servir à une autre table.

Cette femme a été une fidèle exécutrice testamentaire de la volonté de Jésus qui à la veille de sa mort, nous a légué deux gestes qu’Il a explicitement demandé à ses disciples de « faire » au sens fort du mot : l’un à son exemple, « Je vous ai donné l’exemple ». C’est celui du lavement des pieds, signe du service; l’autre en mémoire de lui, «  Faites cela en mémoire de moi ». C’est celui de l’eucharistie, signe d’une vie nourriture.

Ces deux gestes : servir et faire mémoire résument toute la vie de cette femme de foi, de courage dans les épreuves, d’espérance en Dieu. Vivre ensemble n’est pas toujours facile. Faire mémoire du Christ, en devenir Témoin exigent beaucoup de foi. C’est cette foi la poussait à venir l’an dernier, alors qu’elle était souffrante, marchant péniblement, à l’eucharistie pour admirer Dieu, mais aussi pour s’exclamer devant la nature si belle qui l’accueillait. Pour elle, la nature, les arbres, la forêt, étaient des paroles de Dieu. Des lieux de rencontre, d’intimité avec Dieu. C’est dans la foi qu’elle vivait les remarquent qu’on lui faisait : « tu crois encore à cela »

Rendre service a été sa manière de voyager dans la vie. Ce fut pour elle une règle d’or et en or. « Le but de la vie, c’est être vraiment soi-même. » (Kierkegaard). Jacline l’a été en servant.  Elle a pris au sérieux ce que disait le catéchisme de son enfance : « nous avons été créé pour Le connaître, aimer et servir ». Pour elle, servir n’était pas « faire quelque chose pour les autres », c’était sa nature profonde, sa richesse. C’est l’héritage qu’elle nous lègue.

La foi de Jacline, sa vie qui vient " de prendre le chemin de tout le monde " (Job) nous rappelle cette vérité à ne pas oublier et qu’exprimait dans un lointain passé Socrate : «  la vie non regardée en profondeur ne vaut pas la peine d'être vécue car ce n'est pas la vie ». Le prophète Osée disait « Certains ont semé le vent, ils ne récolteront que tempête » (lecture de Mardi). L’évangile nous dit que « si le grain de blé n’est pas jeté en terre, il ne portera pas de fruit. »

Jacline a connue une «double vie» : une vie consacrée au « service par en bas » et une autre connexe, indissociable, consacrée au « service par en Haut » dans l’eucharistie. Nous sommes ici maintenant pour lui offrir « le salut par en Haut » qu’est cette célébration. Remettons à la poste éternelle, cette « lettre de Dieu » que fut Jacline pour nous. Oui «Jésus est venu du grand jour de l’Éternité pour introduire dans notre temporel un grand jour éternel » (Saint Augustin, lecture du 24 décembre au bréviaire) Que Marie, dont elle priait chaque jour dans son chapelet, la présente maintenant à son Fils pour qu’il la reçoive à la table de l'eucharistie sans fin. AMEN
  

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Vendredi, 1 septembre, 2006

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