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2018-B-Mt 12, 14-21 - samedi 15e semaine ordinaire - qu'as-tu fait de ton frère ?

Année B : samedi de la 15e semaine ordinaire (litbo15v.18)
Mt 12, 14-21 : qu’as-tu fait de ton frère ?

Voici mon serviteur que j’ai choisi. Chaque jour cette semaine, Matthieu nous présentait un serviteur qui était plutôt dérangeant. Isaïe ajoute, et c’est loin d’être reposant tant il laisse à entendre que ce serviteur est quelqu’un d’important, je ferai reposer sur lui mon esprit. Jésus est un serviteur plein d’esprit de liberté, d’égalité et de fraternité, pour citer la devise française. Le mot qui le définit le mieux est déchirure (Gui lauraire)

Jésus déchire le système de son temps. Il apparaît comme un indigné qui vient au secours des vulnérables. L’exégète Käsemann affirme que le style de vie de Jésus lui a attitré la haine des forts et de gens pieux et a fini sur la croix. Il n’a pas passé sa vie vissée sur un prie-Dieu. Il est faux de percevoir Jésus comme un gentil monsieur qui cherche à plaire, à se faire aimer de tout le monde. Jésus est empêcheur de tourner en rond dans une société bien rodée au service des gens corrects.

Croire en un Jésus bonace, un Jésus, sorte d’homme rose, détourne nos regards sur le vrai Jésus des évangiles. Jésus a préféré autant la justice que l’amour. Victor Hugo écrit qu’on fait la charité quand on n’a pas réussi à supprimer l’injustice. C’est très évangélique. Souvent nous nous mettons à prier pour éviter à travailler à supprimer l’injustice. C’est moins engageant. Ça donne bonne conscience. C’est passer à côté de l’évangile.

Jésus vient questionner une vie repliée sur elle-même. Ce qui est renfermé finit par sentir l’humidité et par nous rendre malades (Gaudete # 133). À trop s’occuper de nous-mêmes,  nous n’avons plus de temps pour les autres. Nous ne les voyons plus.

Jésus ouvre des chemins de réforme. Il préfère dans les mots de Jean XX111 ouvrant le concile, recourir aux remèdes de la miséricorde plutôt que de brandir les armes de la sévérité. Jésus dégage une telle qualité d’humanité  qu’il ne se contente pas de porter secours pour disparaître au nom d’une tâche plus urgente. Il est cet hôtelier qui ouvre sa maison aux brigands (Lc 10, 30), ces personnes tombées par terre et dont les fragilités et les laideurs humaines effarouchent l’amour des autres (Friederike Görres). Sa priorité : se faire proche des humains. On rapporte que Jésus a passé plus de temps dans la rue que dans le temple à prier.

Chemin de réforme : à qui lui demande s’il veut changer la religion, Jésus n’hésiterait pas à donner cette réponse candide du pape François à qui le voit comme réformateur : non, je veux seulement mettre Dieu au centre de votre culte. À ceux qui surveillent au nom de la loi, il propose de veiller au nom de la tendresse. Son visage est celui de la miséricorde (misericordia vultus #1).

Jésus promeut une vie de service plutôt qu’une vie de pacha. De quoi discutiez-vous en chemin (Mc 9, 33) demande Jésus à ses disciples qui discutent pour savoir qui est le plus grand. Songeons à son discours sur la montagne. Il déclare heureux, c’est-à-dire saints (cf. Gaudete # 64) ceux qui vivent à contre-courant d’une culture hédoniste. Chaque béatitude vise à transcender l’exclusivisme égoïste, à sortir de notre petit nuage d’autosatisfaction, à libérer en nous cette toxine mentale de préférer une vie recroquevillée sur soi, à décomposer tout le moi [pour] créer un nouveau nous[1] pour citer un jeune théologien des années 70, Joseph Ratzinger.

Chemin de réforme : Jésus instaure une logique de cohésion sociale, d’égalité, de dignité des personnes à l’opposé de celle qui est en place. Il refuse un culte qui favorise l’exclusion des imparfaits, rejette que des humains soient perçus comme des déchets.  Ce qui est sacré, ce n’est pas le temple ni le shabbat, c’est l’être humain. Dans son exhortation sur la sainteté (#101), le pape demande d’éviter de vivre en suspectant l’engagement social […] comme quelque chose de superficiel, de mondain, de laïcisant.

Une question en conclusion : Qu’as-tu fait de ton frère  (Gn 4, 10) ? Qu’est-ce qui est premier dans notre vie de croyant ? Je répète ces mots de Victor Hugo : on fait la charité quand on n’a pas réussi à supprimer l’injustice.

AMEN.



[1] Augustin George, appelés à la joie, oser être prêtre, Ed Médiapaul, 2017 p.188

 

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Date: 
Vendredi, 1 juin, 2018

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